19.8.24

LE FOU DU MARCHIX ET LA MOROSITÉ DE LA JUSTICE !

 

Nous sommes en 1786. A cette époque un tisserand, nommé Jean Deloge, originaire de Saint-Georges-de-Reintembault, habite depuis quelques années au « faubourg du Marchix », en la paroisse Saint-Sulpice. L'homme est quelque peu perturbé depuis quelques mois, ce qui inquiète le général de la paroisse, car Jean Deloge s'en prend aussi aux habitants du quartier.

 Le 5 novembre 1786, le général, sans succès semble-t-il, s'est déjà adressé au procureur fiscal de la juridiction de la Trinité dont dépend le quartier du Marchix, afin qu'il prenne les mesures nécessaires à l'encontre du pauvre Deloge, fasse cesser ses menaces et ramène le calme et la sécurité tant chez « ce malheureux » que chez les habitants. Devant « la morosité » du procureur, le général se doit de le mettre en demeure d'agir.

 Selon le procès-verbal qui fut dressé, nous apprenons que depuis un mois surtout, Jean Deloge est « dans un état de furie qui donne lieu au public et en particulier aux habitants de la paroisse Saint-Sulpice, les funestes effets de sa folie. Il bat et maltraite quantité de personnes, veut en tuer d'autres, jette son bonnet sur les autres et au passage de nos gens, veut mettre le feu chez lui où il a cassé et rompu une partie de ses meubles ». Le général de la paroisse ne peut tolérer, pour des raisons de sécurité publique évidentes, de tels agissements, car « selon les règlements, un homme aussi dangereux doit être renfermé ». Jean Deloge qui est relativement à l'aise, il convient aussi de protéger ses biens car l'on dit que « ses biens meubles et effets sont d'une valeur assez grande pour être mis à l'abri des vols ».


Vieilles maisons de la Place du Marchix


Aussi le général menace-il Joseph Vignon de la Perrière, procureur de la juridiction de la Trinité, « de pourvoir directement contre lui personnellement en cas de morosité » - un joli mot pour qualifier l'incurie et l'incapacité de l'homme de justice -. La notification officielle fut faite très solennellement puisque se rendirent chez le procureur, le sergent René Julien, le notaire Armand Caillère, Joseph Lemonnier, trésorier de Saint-Sulpice en exercice et un archer nommé Jean Saucet. Ce fut le greffier du procureur, Pierre Jumelais, qui reçut la délégation et dressa officiellement acte de la demande du général de la paroisse.

 Il semble que cette démarche fut cette fois suivie d'effet, car Jean Deloge qui au moment des faits, était âgé de 37 ans, fut placé à l'hôpital général Saint-Louis où il mourut célibataire, à l'âge de 60 ans, le 25 mars 1809. Il y exerçait toujours son métier de tisserand, ce qui n'a rien d'extraordinaire car, pendant très longtemps, l'hôpital Saint-Louis employa des tisserands pour la fabrication de la toile dont il tirait profit.

Marcel HODEBERT



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